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Mobiliser les connaissances et le jugement dans des situations complexes

Au début de leur formation, il est certain que nos étudiants et étudiantes veulent acquérir des connaissances claires et recevoir des réponses sans ambiguïté à leurs questions. Cependant, il existe souvent des situations où les connaissances théoriques acquises ne sont pas suffisantes pour répondre à des questions complexes qui recèlent de l’incertitude. Que faire si plusieurs solutions demeurent acceptables ? Comment engager les étudiantes et étudiants dans cette réflexion ?

La formation par concordance (FpC) pour enseigner les situations complexes

Joseph Omer Dyer
Professeur agrégé à l'École de réadaptation
Portrait de Joseph Omer Dyer

Joseph-Omer Dyer, professeur et directeur des programmes de physiothérapie à l’École de réadaptation, utilise la formation par concordance (FpC) depuis plusieurs années. Cet outil permet de mettre les étudiants et étudiantes face à des situations réelles (des vignettes) au cours desquelles des données supplémentaires sont fournies pour préciser ou ajuster leur réponse, leur action. L’avantage pédagogique de la FpC est que l’étudiant ou l’étudiante peut ensuite comparer son choix avec les différentes perspectives de personnes expérimentées sur le sujet.

Selon le Pr Dyer, cet outil présentement accessible dans StudiUM permet d’enseigner et de valider les éléments nécessitant une plus grande réflexion. En comparant sa réponse avec celles des personnes expérimentées, l’étudiante ou l’étudiant reçoit une rétroaction qui lui permet de juger de la qualité de sa réponse, de mieux comprendre les différentes perspectives dans cette situation, et ce, sans se sentir jugé.

Dans certains cas, il dit faire appel à jusqu’à une dizaine de personnes expérimentées (qui ont un savoir expérientiel) pour avoir leur avis. Voici un exemple de rétroaction qu’un étudiant ou une étudiante pourrait obtenir.

Nous avons sollicité l’avis de 15 experts sur la situation présentée (personne avec une douleur neuropathique) en leur demandant si la pertinence de l’action proposée (choix de traitement par stimulation tactile) serait inchangée, augmentée ou diminuée en présence d’une nouvelle information (manque de sensibilité tactile)

  • Vous avez dit que votre avis sur cette situation demeurerait inchangé (après la nouvelle information), mais la plupart des experts, soit 10 sur 15, ont indiqué « augmenté », alors que 3 ont opté pour « inchangé » et 2 pour « diminué ».

Élément important, l’apprenant ou l’apprenante obtiendra la synthèse des réponses et aura aussi accès au rationnel des personnes expérimentées présentant leurs différentes perspectives. Si la démarche d’apprentissage se déroule sur une base autonome (ex. : en ligne de manière asynchrone), le niveau d’accompagnement par rapport à la rétroaction demeure important, particulièrement lorsque les réponses ne vont pas dans le sens de la majorité des experts consultés.

L’idéal, c’est de faire un retour avec les étudiantes et étudiants en présence. Ils sont entre 80 et 110 dans mes groupes et il devient difficile de donner une rétroaction individuelle.

Joseph-Omer Dyer ajoute qu’il a formé des étudiants et étudiantes pour l’élaboration de vignettes à partir de situations authentiques vécues en stage. L’expérience s’avère très stimulante pour le groupe, qui doit se pencher sur des cas préparés par les collègues.

La formation par concordance en contexte clinique

Marie-France Deschênes
Professeure adjointe à la Faculté des sciences infirmières (2)
Portrait de Marie-France Deschênes

Professeure à la Faculté des sciences infirmières, Marie-France Deschênes fait appel à la FpC dans ses cours depuis plusieurs années ; elle a d’ailleurs choisi d’en faire le sujet de sa thèse de doctorat.

Dans un cours de 1er cycle sur les pratiques infirmières en contextes médicaux, les étudiants et étudiantes vont sur la plateforme en ligne StudiUM, où des situations fréquentes de la pratique sont utilisées (p. ex., une personne recevant de l’insuline, une autre présentant une lésion de pression ou à risque de développer un ulcère diabétique).

Cette activité avec 3 ou 4 vignettes peut nécessiter de 30 à 45 minutes de travail en mode asynchrone. On teste des hypothèses en tenant compte des informations données. L’étudiant ou l’étudiante répond, par exemple : « Je devrais appliquer un nouveau pansement. » À la suite de sa réponse, il peut voir que cinq sur six experts se sont exprimés dans le même sens. Il devient possible de comparer son rationnel avec le leur.

L’avantage d’un format asynchrone est le cheminement à son propre rythme et sans jugement de l’extérieur. Marie France Deschênes souligne un point essentiel : 

Il est important que les personnes expérimentées ou les panélistes adaptent leur réponse, leur langage en fonction du niveau de formation du groupe.

Elle reconnaît aussi avec satisfaction qu’elle n’est plus la seule personne à donner sa propre réponse aux étudiants et étudiantes, les experts le font également.

Ce processus de raisonnement clinique s’avère très formatif, d’autant plus que même les exoerts peuvent diverger entre eux dans leurs réponses.

Pour Marie-France Deschênes, la FpC constitue véritablement un apport : 

Des études mentionnent que plusieurs personnes abandonnent leur travail en contexte de trop grande incertitude. Quand les gens expérimentent la formation par concordance, ils en voient les bénéfices, notamment pour mieux « jongler » avec les situations incertaines de la vie professionnelle.

Des pistes pour les autres disciplines

Selon Claude Martel, directeur du Centre de pédagogie universitaire (CPU), les possibilités d’utilisation de la FpC dans d’autres disciplines sont nombreuses :

Claude Martel
Directeur du Centre de pédagogie universitaire (3)
Portrait de Claude Martel

Toutes les circonstances dans lesquelles les étudiants et étudiantes doivent analyser et interpréter une situation complexe (au niveau logique ou même visuel) conviennent parfaitement à la formation par concordance, que ce soit dans les sciences de la santé, les sciences sociales, les arts ou les lettres.

Se comparer à des praticiennes et praticiens ou à des experts permet de raffiner le raisonnement et de les rapprocher de la performance que leur profession attend d’eux. C’est un outil qui deviendra incontournable dans plusieurs domaines d’enseignement.

Le CPU remercie très chaleureusement le personnel enseignant qui a accepté de partager son expérience pour la rédaction de cet article.

Pour en savoir plus sur la formation par concordance, le CPU offre une formation en ligne à ce sujet.

Vous souhaitez mettre en place une Formation par Concordance? Vous êtes simplement curieux de découvrir cette démarche pédagogique innovante? Cette...

Crédits photo

  1. Groupe interdisciplinaire de recherche sur la cognition et le raisonnement professionnel (GIRCoPRo)
  2. Collège de Maisonneuve
  3. Claude Martel